A.. INSTALLATION ET MANŒUVRES DU
CHALUT A BORD D'UN CHALUTIER
TRAVAILLANT PAR LE COTE
1)
Installation à bord.
Un chalutier possède
d'habitude deux chaluts
entièrement gréés sur son pont,
un de chaque bord. Ces chaluts
peuvent être utilisés
indifféremment des deux bords
grâce à une disposition
symétrique des passages de funes
et des potences (fig.71).
L'avantage d'une telle
disposition réside dans le fait
que si le premier chalut est
avarié, on peut filer le
deuxième sans perdre de temps,
car il suffit de changer les
funes de côté. En dehors de
cette disposition classique,
nous devons noter cependant que,
de plus en plus, des chalutiers
ne travaillent que d'un bord,
habituellement tribord. Dans ce
cas, les chaluts de rechange
sont entreposés dans un magasin
à proximité du pont. Il existe
aussi différents systèmes de
pêche par l'arrière, mais ce ne
sont encore que des exceptions
dans le secteur faisant l'objet
de cette étude.
Les éléments essentiels de
l'installation d'un chalutier
sont: le « treuil »,
les « potences »
et le « chien ».
Le treuil est
placé transversalement en avant
de la passerelle. Suivant le
type du bateau, il est entraîné
soit par une courroie attelée
sur le moteur principal, soit
par un moteur spécial électrique
ou hydraulique.
Le treuil comporte « deux
tambours » avec
embrayage et freins. La
régularité de l'enroulement des
funes est assurée par un
guide-câbles à main ou, ce qui
est préférable, automatique. De
chaque côté du treuil, on trouve
des « poupées »
servant à virer les différents
filins employés pour la manœuvre
du chalut sur le pont.
Les potences
sont placées près du bord. Leur
emplacement et leur orientation
sont étudiés pour permettre une
mise à l'eau et un embarquement
faciles des « panneaux ».
Entre le pavois et les potences
un espace suffisant est ménagé
pour le rangement des panneaux
quand on n'est pas en pêche. Au
sommet des potences, on trouve
des « poulies » ou
« rouleaux à émerillon ».
A chaque potence est fixée une
chaîne servant à supporter les
panneaux lorsqu'on les démaille
de la fune pour pouvoir virer
les bras. La chaîne prend le
panneau par les branchons ou par
un anneau. Sur les grands
chalutiers, l’utilisation d'une
« chaîne à croc
déclenchable à distance »,
au moyen d'un filin passant sur
une poulie de renvoi permet une
manœuvre dans de meilleures
conditions de sécurité.

Le chien est,
dans sa forme la plus simple, un
cadre de fer articulé fixé près
de l'arrière du bateau. Son rôle
est de réunir les funes près du
bord en les maintenant toutes
les deux à la même hauteur et
bien dégagées de l'hélice.
D'autres systèmes de chiens plus
perfectionnés peuvent être
utilisés, tels la « poulie
Lemoine » ou le « chien
à enclenchement automatique».
Quand le chalutier n'est pas
en pêche, le chalut est disposé
sur des piquets de fer ou tolets
enfoncés dans le plat-bord. En
général, on procède, pour ce
faire, de la manière suivante :
on place d'abord la corde de
dos, puis le bourrelet (la corde
de dos étant en dessous, le
chalut est donc renversé, mais
cette inversion dessus dessous
disparaît lorsqu'on jette le
filet à l'eau, le corps du
chalut passant au-dessus du
bourrelet et de la corde de
dos), ensuite les ralingues de
côté en faisant plusieurs plis
si besoin est. L'alèze en excès
est reprise sur les tolets et,
pour terminer, on place par ses
ralingues la rallonge pliée en
long. Le cul est disposé soit
sur le plat-bord ou sur la
plateforme au-dessus de la
potence arrière, soit hissé sur
une drisse de mât. Quand on
utilise des plateaux élévateurs,
la corde de dos est placée en
dernier pour dégager les
amarrages des queues de
plateaux.
2) Manœuvres
de filage et de virage.
a)
Filage
(fig. 72).
Avant de mettre en pêche, le
chalut est enlevé des tolets et
placé à grands plis sur le
plat-bord, si le temps le
permet, ou à l'intérieur du
pavois s'il fait mauvais temps.
Pour mettre le chalut à
l'eau, le chalutier stoppe et se
met en travers, tribord au vent.
L'équipage jette le chalut à
l'eau en commençant par la
poche. Dans certains cas, avec
un mât de charge débordant
suffisamment, le cul est mis à
l'eau au moyen d'un filin
terminé par un croc à
déclenchement et viré au treuil.
Le reste du filet est jeté à la
mer et s'écarte du bord par
suite de la dérive du bateau. Le
bourrelet part à l'eau, puis la
corde de dos et les plateaux
élévateurs s'il y en a. On file
les bras en mettant en avant
lente, la barre à 10° tribord.
Quand on a pris un peu d'erre,
on stoppe la machine; les funes
sont maillées sur les panneaux
et les chaînes qui retiennent
les panneaux aux potences sont
enlevées. On remet en avant, la
barre à environ 15° tribord. Le
chalutier décrit un cercle -
plus ou moins large suivant la
longueur des bras - pour bien
établir le gréement et pour
venir jusqu'au cap où se fera le
filage des funes.
Peu avant d'arriver à ce
cap, les bras étant bien raidis
et le chalut bien déployé, on
stoppe la machine (certains
chalutiers font la manœuvre sans
stopper) et on laisse partir les
panneaux jusqu'aux marques de
filage, repères placés sur les
câbles à 18/20 brasses en avant
des panneaux. En général, la
marque de l'avant est amenée
juste après la potence avant et
la marque de l'arrière par le
travers de la passerelle. Les
marques filées, on met en avant
toute en vérifiant que par la
vitesse la fune de l'avant
s'écarte du bord, la fune de
l'arrière restant à toucher le
bord. Tant que la fune avant
écarte, il n'y a pas de danger
pour l'hélice. Les funes sont
filées en freinant doucement
pour conserver une certaine
force de traction sur le
gréement. Ce freinage est obtenu
parfois par le moteur électrique
du treuil fonctionnant en
génératrice; cette méthode
appelée filage électrique assure
par son freinage très progressif
et équilibré un filage des
câbles sans à-coups. La longueur
de funes filée est contrôlée par
les marques placées sur les
funes à intervalles réguliers
(par exemple tous les 50 mètres
ou toutes les 50 brasses) (1).
Pendant le filage des
câbles, le chalutier reste au
même cap, en avant toute. Quand
il ne reste plus que quelques
dizaines de mètres à filer, la
vitesse du chalutier est réduite
pour éviter de donner au chalut
une secousse brutale il la fin
du filage.
Le filage des funes étant
terminé, les funes sont ramenées
ensemble près du bord à l'aide
de la vérine, câble muni d'un
croc et le chien est mis en
place.
(1) Signalons l'existence de
compteurs métriques pour les
funes (type Olympie) qui
permettent de vérifie .les
longueurs de câbles filées.
Longueur de filage des funes
: c'est un point important dont
dépend en grande partie le
rendement du chalut. Toutefois,
il convient de dire qu'il
n'existe pas de règle générale
donnant la longueur de funes à
filer suivant la profondeur
d'eau, car la relation entre ces
deux données n'est pas la même
selon le type de pêche, la
nature du fond et le gréement.
Nous donnons, par exemple, sur
le graphique de la figure 73,
les longueurs de filage
habituelles en fonction de la
profondeur des chalutiers de
pêche industrielle boulonnais et
celles des chalutiers de grande
pêche. On voit que ces derniers
utilisent, en général, des
longueurs de funes relativement
plus courtes que celles des
chalutiers boulonnais.
La longueur des funes n'est
pas seulement en rapport avec la
profondeur, elle est aussi en
relation avec la longueur des
bras et des entremises. En
outre, elle est établie en
fonction de la nature des fonds,
de la surface des panneaux et du
type de gréement utilisé.
Principes concernant le
filage des funes
et la longueur des bras et
des entremises
1° Pour un chalutier
et un gréement donnés(l), il
existe un rapport optimum entre
la longueur cumulée bras +
entremise + 1/2 corde de dos et
la longueur de funes filée (ou,
d'une manière plus précise, la
projection de cette longueur sur
le plan horizontal du fond). Ce
rapport optimum correspond au
meilleur compromis existant
entre J'action de rabattement
des bras ou des entremises et
l'angle d'ouverture horizontale
du filet. Il conditionne donc le
rendement de l'engin.
Exemples.
Sur les chalutiers de pêche
industrielle de Boulogne, le
rapport « bras + entremises +
1/2 corde de dos / funes
» est en moyenne de 1/5 à 1/6.
Ce rapport est à peu près
constant sur des fonds variant
de 50 à 300 m et davantage. Sur
les faibles profondeurs, malgré
l'emploi d'entremises et de bras
encore assez longs, le rapport
est conservé en filant davantage
de funes (fig.73).
A bord des chalutiers de
grande pêche, qui travaillent
couramment sur des fonds
irréguliers, le filage des funes
est, en général peu élevé. Les
bras étant assez courts (60 à 80
m au lieu de 100 à 150 m pour
les boulonnais), le rapport «
bras + entremises + 1/2 corde de
dos / funes » est également
de 1/5 à 1/6 sur les fonds de
180 à 200 m habituellement
exploités par ces chalutiers.
On note cependant une
différence par rapport aux
chalutiers boulonnais: le
rapport varie suivant les
profondeurs car la relation fune
/ sonde et la longueur des bras
varient peu (rapport fune /
sonde = 3 environ, fig. 68). Sur
les fonds de 100 m, le rapport
n'est plus que de 1/3 et sur les
fonds de 300 m le rapport est de
1/8 environ.
2° Les trois forces
(traction de la fune, divergence
du panneau et résistance à
l'avancement du filet) étant en
équilibre, pour une longueur de
bras donnée, un raccourcissement
des funes diminuera à la fois le
rabattement des bras et
l'ouverture horizontale du
chalut (fig., 74-1). Au
contraire, un allongement des
funes augmentera l'effet de
rabattement des bras et
l'ouverture horizontale du
filet.
Toutefois, dans ce dernier
cas, la limite d'efficacité est
atteinte assez rapidement et une
longueur de funes exagérée
(rapport fune / sonde supérieur
à 6 ou 8, ou rapport « bras +
entremises + ½ corde de dos /
fune » inférieur à 1/8) ne
donnera pas d'amélioration
sensible du rabattement
horizontal et elle viendra
peut-être le contrarier, les
funes trop longues traînant sur
le fond en avant et en dedans
des panneaux.
(1)
Lorsqu'on change de gréement
(par exemple quand on passe d'un
gréement léger comportant un
chalut en fil fin et à bourrelet
peu chaîné à un gréement lourd
type chalut à fond dur en gros
fil et à longue ligne de
sphères) l'équilibre traction -
divergence - résistance est
détruit. Il pourra, en général,
être retrouvé en modifiant l'un
des éléments principaux filage
des funes longueur des bras,
force de divergence des
panneaux.

3° Pour la même
raison, pour un filage de funes
donné, un allongement des bras
tendra à augmenter l'action de
rabattement des bras, mais, en
contrepartie, tendra à diminuer
l'ouverture horizontale du filet
(fig. 69-2). A l'inverse, un
raccourcissement des bras se
traduira par une diminution de
leur effet de rabattement et par
une augmentation de l'ouverture
horizontale du chalut (1).
Dans la pratique,
on déterminera par l'expérience,
pour chaque type de pêche, le
rapport optimum « bras
+ entremises + 1/2 corde de dos
/ funes » et on s'efforcera
de le conserver dans la mesure
du possible, quelle que soit la
profondeur. Si la nature des
fonds permet l'emploi de longs
bras, ce qui est souhaitable
pour le rendement d'un chalut en
poissons démersaux, ce rapport
sera maintenu en ajustant la
longueur des funes. Sur des
mauvais fonds où le filage des
funes doit être limité, on
conservera le rapport optimum en
modifiant (en général en
raccourcissant) la longueur des
bras.
De faibles modifications du
rapport optimum seront, en
général, sans conséquences
notables sur le rendement du
gréement. Une diminution du
rapport jusqu'à 1/8 ou même 1/10
est possible, car elle modifie
très peu l'équilibre des forces
(traction, divergence et
résistance). Par contre, une
augmentation du rapport (au-delà
de 1/4 par exemple) provoquera
rapidement une diminution du
rabattement des bras et de
l'ouverture horizontale du
chalut; il en résultera une
diminution du rendement de
l'engin de pêche sur les
poissons de fond.
Les principes qui viennent
d'être énoncés sont basés sur
des considérations théoriques
volontairement simplifiées. Nous
avons pu néanmoins les vérifier
lors d'essais de modèles réduits
(cf. bibliographie) (2) et au
cours d'essais en grandeur
réelle effectués récemment à
bord du « Roselys », bateau de
recherches de l'Institut des
Pêches (Bull. « Science et
Pêche» n° 95).
b)
Virage
(fig. 75).
Pour relever le chalut, les
opérations sont, dans
l'ensemble, inverses de celles
du filage. En général, le
chalutier vient vent arrière; le
chien est largué et le bateau
stoppe et vient en travers,
tribord au vent, en virant les
funes. Afin que les panneaux
arrivent ensemble aux potences,
on vire d'abord la fune de
l'avant d'une certaine longueur,
puis les deux funes ensemble.
Dans certains cas, le chalutier
vire ses funes vent arrière, en
avant demi en conservant son
cap; on évite ainsi les
secousses dues au roulis en
travers du vent. Le chalutier ne
vient alors en travers et ne
stoppe qu'au dernier moment, un
peu avant que les panneaux
n'arrivent aux potences.
Les panneaux sont assurés sur
leurs chaînes aux potences, les
funes sont démaillées (on peut
utiliser des crocs «
clencheurs » qui
permettent une manœuvre plus
rapide qu'avec des manilles) et
on vire les bras à l'aide de
l’installation classique
rapporteur, huit et stoppeur.
Quand les guindineaux sont
arrivés aux potences, on vire
les parpaillots et le bâillon.
Les plateaux élévateurs sont
embarqués avant que la corde de
dos et le bourrelet ne passent
par dessus le plat-bord. Le
grand dos et le corps du chalut
sont rentrés à la main par
l'équipage. L'aile avant et,
éventuellement, l'aile arrière
sont rentrées à l'aide des
lapins.
Pour empocher le poisson, la
rallonge est virée au treuil au
moyen d'un palan simple passant
soit sur une poulie placée à
l'angle supérieur avant de la
passerelle ou sur le mât de
charge latéral arrière, soit
horizontalement en travers du
pont. Une saignée à l'extérieur
du pavois permet de saisir
facilement la rallonge.
Lorsqu'on vire la rallonge sur
le mât de charge arrière, le
chalutier bat en arrière,
provoquant un courant d'eau qui
aide le poisson à glisser dans
la poche. Le bâillon amène le
cul le long du bord; on peut
alors crocher le dindin, filin
d'acier passant sur une poulie
maillée sur le mât de charge
avant et servant à hisser la
palanquée. Le cul de chalut
plein de poissons passe
au-dessus du plat-bord et vient
s'appuyer sur la bretelle; un
matelot largue le raban de cul
et les poissons tombent sur le
pont dans un parc. Certains
coups de chalut ramènent 10 à 15
tonnes de poissons et parfois
plus; on fait alors plusieurs
palanquées de 1 000 à 2 000 kg,
toute la pêche ne pouvant être
embarquée d'un seul coup.
(1) Pour conserver au chalut
toutes ses capacités de capture,
l'ouverture horizontale du filet
ne doit pas dépasser une
certaine limite (avec les
chaluts actuels cette limite,
exprimée en angle de traction
aux ailes, est d'environ 15 à
20°). Un excès d'ouverture
horizontale risque d'aplatir le
chalut et donc de diminuer son
rendement de pêche sur les
espèces de poissons se trouvant
à une certaine distance du fond.
Cette remarque est
particulièrement valable pour
les chaluts de fond à grande
ouverture verticale et pour les
chaluts pélagiques.
(2) Signalons, par ailleurs, que
des essais de modèles de chaluts
avec plateaux élévateurs ont
permis d'établir une nouvelle
méthode graphique de
détermination des longueurs des
petits bras et des queues de
plateaux. Le principe de cette
méthode a été exposé dans le
bulletin «Science et Pèche ». N°
92
c)
Manœuvres dans des conditions
particulières
Filage des funes par mauvais
temps:
quand le vent est très fort, il
est parfois dangereux de filer
les funes à certain cap, la
dérive importante sous le vent
risquant de mettre une fune dans
l'hélice. Dans ces conditions,
on est obligé de filer en ayant
au moins un quart de vent par
tribord.
Mise
à l'eau du chalut par calme
plat:
la dérive est nulle. On écarte
le chalut du bord en manœuvrant;
la manœuvre la plus courante
consiste à faire en arrière puis
en avant, la barre à tribord.
Virage par mauvais temps
: quand la mer est trop forte
pour rester vent de travers,
toutes les opérations de virage
(largage du chien, virage des
funes, embarquement du chalut)
se font vent arrière. Les hommes
sur le pont sont ainsi moins
exposés aux paquets de mer. Pour
se maintenir vent arrière avec
une vitesse à peu près nulle et
sans masquer (dériver sur le
chalut) le patron de pêche doit
manœuvrer avec beaucoup
d'attention.
Croche sur le fond
: pour dégager un panneau, un
bras ou un chalut engagé sur le
fond, on file la fune arrière
pour permettre l'évitage et on
revient en avant lente, cap
inverse, vers le chalut en
virant les funes. Quand
celles-ci sont à pic de la
croche on stoppe la machine. Si
le train de pêche ne se dégage
pas tout de suite, on vire les
câbles l'un après l'autre. Si le
courant de marée est trop fort
et porte sur la croche, il est
préférable d'attendre la
renverse du courant.
3)
Conduite du chalutage.
La pratique du chalutage
demande une bonne connaissance
du fond et des courants, ainsi
que des lieux et époques de
pêche des espèces commerciales,
Le patron ou le capitaine de
pêche dispose pour cela de
documents tels que: cartes et
atlas de pêche, instructions
nautiques et cartes de courants.
Les positions précises des lieux
de pêche ou des mauvais fonds
sont obtenues par les procédés
de radionavigation « Conso
»,
« Loran » et
surtout « Decca ».
Le « radar » et le
« gonio » sont
aussi des instruments précieux
pour la navigation à faible
distance des côtes.
Le « Decca »
est l'auxiliaire le plus utile.
Il permet en effet une
localisation très précise des
croches ou épaves et des bancs
de poissons détectés par le
sondeur. Avec un Decca, complété
éventuellement par son «
traceur de route », il
est possible de faire un
chalutage efficace et d'éviter
en grande partie les pertes de
matériel par avaries ou croches.
Un « sondeur
enregistreur » à
ultra-sons est un appareil
indispensable à bord d'un
chalutier. Grâce à lui. on peut
connaître la sonde, le profil et
la nature du fond, ainsi que la
présence éventuelle des bancs de
certaines espèces de poissons.
On associe souvent à
l'enregistreur un analyseur
cathodique ou « loupe à
poissons» qui donne une image
agrandie de la détection dans
une tranche d'eau limitée.
Les appareils suivants sont
également très utiles.
Le « loch électrique »
donne la vitesse de route ou de
chalutage. Un indicateur de
nombre de tours renseigne à tout
moment sur le régime du moteur.
Pour une bonne utilisation de
celui-ci. il est bon de prévoir
aussi un avertisseur de
surcharge.
Un « enregistreur de
traction » sur les
funes, parfois couplé avec un « enregistreur
de vitesse », permet de
connaître et d'équilibrer la
traction sur les funes ; il
permet aussi d'être averti des
croches même légères (un signal
sonore et lumineux peut être
utilisé conjointement; il se
déclenche lorsque la traction
dépasse une limite fixée à
l'avance). Couplé à un
enregistreur de vitesse, il peut
fournir des renseignements sur
le bon fonctionnement du chalut
et éventuellement, sur le
remplissage du chalut dans le
cas de très fortes pêches (1).
Une « hélice à pas
variable » permettra, en
plus de l'amélioration de
rendement en traction qu'elle
apporte, de faire certaines
manœuvres impossibles avec une
hélice à pas fixe. Ceci n'est
valable que pour les chalutiers
à treuil entraîné par le moteur
principal; par exemple, sur les
petits chalutiers scandinaves il
est possible de virer les funes
à une très grande vitesse tout
en faisant avancer doucement le
bateau vers le chalut. En effet,
le moteur, tournant à plein gaz
pour le treuil, peut rester
embrayé sur l'hélice réglée à un
faible pas. Cette méthode est
surtout employée sur les
chalutiers au hareng (DICKSON,
1957).
Signalons également
l'adoption, sur les chalutiers
les plus modernes, du « pilote
automatique » (associé.
en général, à un « gyrocompas »).
Cet appareil maintenant le cap
sans faire d’embardées, la route
et la traction sur le chalut se
font dans de meilleures
conditions.
(1) L'enregistreur de traction
sur les funes remplace
maintenant les appareils de
mesure de la poussée de J'hélice
(HOPPE, 1951 ; ANCELLIN et
NEDELEC, 1954).
B.. MANŒUVRES PARTICULIERES A
CERTAINS TYPES DE BATEAUX OU A
CERTAINES METHODES DE PECHE.
1°
Chalutiers étaplois.
Beaucoup de chalutiers
artisanaux d'Etaples n'utilisent
pas de chien. Leur fune de
l'arrière est munie toutes les
20 brasses d'une maille en acier
dans laquelle on passe un croc
fixé à une retenue en filin
d'acier amarrée sur la potence
avant de bâbord. On donne alors
du mou dans la fune et la
traction du chalut vient se
faire symétriquement des deux
bords. Les funes sont maintenues
près des potences arrières par
deux bosses en chaîne. Il
résulte de cette méthode de
traction un gain de puissance
motrice (pas d'angle de barre
pendant le trait), une meilleure
ouverture du chalut et des
changements de cap aussi faciles
des deux bords (pour changer de
cap, on largue la chaîne de
retenue du côté intérieur au
virage; le bateau vient alors
très facilement à son nouveau
cap).
2°
Chalut à ligne de sphères.
Pour mettre à l'eau ou
embarquer la ligne de sphères
des chaluts à fonds durs du type
Svinoe ou Lofoten (cf., partie
II B, fig. 62 c), on a recours à
une manœuvre spéciale. Quand les
poneys arrivent aux potences, on
les bosse et on les démaille des
bras. Faisant suite aux bras par
l'intermédiaire de rapporteurs,
les entremises inférieures
(celles qui aboutissent à la
ligne de sphères) sont virées à
bloc. La ligne de sphères est
tendue entre les potences et
arrive au-dessus du niveau du
plat-bord (des potences assez
hautes et une tonture
relativement accentuée sont
favorables à cette manœuvre). On
l'embarque d'un coup au roulis
(fig. 76). Pour mettre à l'eau,
on effectue la manœuvre inverse.
Après avoir embarqué les
sphères, on rentre le plateau et
la corde de dos à la main; les
parpaillots sont inutiles. La
longueur de la ligne de sphères
est limitée par l'écartement des
deux potences. On utilise
couramment une longueur de 20 m
pour une vingtaine de sphères.
3°
Chalutiers de grande pêche.
A la grande pêche, pour
embarquer ou mettre à l'eau les
diabolos, on complète l'action
des parpaillots par celle du
palan (ou du «facile» dans le
cas de la mise à l'eau) et du
cartahu arrière (fig. 77).
Pour la mise à l'eau de la
poche ou du chalut, on utilise
parfois un « désaqueur
» avec croc à déclenchement.
4° Chalutiers-boeufs.
Les manœuvres de filage et de
virage et l'utilisation en pêche
des « chaluts-bœufs »
ont été décrites dans de
nombreuses études (cf.
bibliographie), aussi en voici
seulement un aperçu.
La mise à l'eau d'un « chalut-bœuf »
de fond est faite par le
chalutier porteur soit par le
côté, soit par l'arrière (fig.
78). On file les bras et l'un
des deux est passé au second
chalutier à l'aide d'un
lance-amarre. La façon de se
présenter de ce chalutier varie
suivant les pays et les
conditions de temps: elle a lieu
par l'avant au vent, sous le
vent ou par le côté. Quand
chaque chalutier a relié son
bras à sa fune, les deux bateaux
filent les funes en s’écartant.
Pour virer le chalut les
manœuvres sont inversés.
Pour un « chalut-bœuf
pélagique » (type
Larsen), les manœuvres de filage
et de virage sont analogues avec
la particularité que ce chalut
nécessite deux bras et deux
funes de chaque côté (fig. 79).
Dans tous les cas, il n'y a
pas de panneaux; l'ouverture
horizontale est assurée par
l'écartement plus ou moins grand
des deux chalutiers. A la place
des panneaux, on utilise souvent
un lest pour aider les bras et
le chalut à se maintenir sur le
fond. Les bras et les funes sont
relativement très longs

Rappelons les avantages
principaux de cette méthode de
pêche. On bénéficie d'une
puissance motrice double et la
résistance à r avancement d.es
panneaux est supprimée. Il est
donc possible de traîner un très
grand chalut dont les capacités
de capture sont bien supérieures
à celles du petit chalut à
panneaux que pourrait remorquer
chaque chalutier pris isolément.
Le rabattement du poisson en
largeur est amélioré par
J'emploi d'ailes et de bras très
longs et par l'action rabattante
des funes qui prolongent
directement les bras vers
l'extérieur.
C.. CHALUTAGE PAR L'ARRlERE A LA
PECHE INDUSTRlELLE
Jusqu’a ces dernières
années, le chalutage par
l'arrière était principalement
pratiqué sur les chalutiers de
pêche artisanale du sud de
l'Europe. L'adaptation de cette
méthode à la pêche industrielle
est relativement récente et, à
ce sujet, nous pouvons rappeler
que le navire océanographique «
Thalassa » a été,
à sa mise en service en 1960, la
première grande unité française
à pêcher par l'arrière et qu'il
a fait figure de novateur et
servi de banc d'essai pour la
pêche de notre pays.
Suivant les dimensions des
chalutiers, les systèmes
actuellement adoptés peuvent se
ramener à deux types principaux
qui se différencient par la
présence ou l'absence d'une
rampe arrière.
1° Chalutiers de pêche fraîche
de moyen tonnage (30 à 50 m de
longueur).
A bord de ces bateaux on
emploie des potences fixes ou,
le plus souvent, un portique
oscillant (« type Mac
Gregor-Unigan » ; le
prototype français est le «
Paris-Bretagne»), Il
n'y a pas de rampe et la pêche
est embarquée par palanquées
successives.
2° Chalutiers de grande pêche
(longueur en général supérieure
à 60 m).
Les potences ou portique sont
fixes dans la plupart des cas.
Ces navires comportent une rampe
arrière par laquelle la totalité
de la pêche est amenée à bord.
L'expérience acquise sur la «
Thalassa » et,
plus récemment, sur les navires
de pêche commerciale comme le «
Colonel Pleven II
», nous permet, grâce en grande
partie aux observations faites
par le Commandant BRENOT,
de définir les caractéristiques
particulières au chalutier par
l'arrière de grande pêche et de
préciser les avantages et les
inconvénients présentés par
cette méthode de pêche.
a) Principales caractéristiques
particulières au navire de
grande pêche chalutant par
l'arrière.
Comme il est préférable
d'avoir une bonne visibilité du
chalut et du gréement pendant
les manœuvres, on peut adopter
soit une passerelle déportée sur
le côté (solution retenue pour
le « Colonel Pleven Il
»), soit une passerelle
surélevée en arche au-dessus du
pont de pêche.
Les formes des œuvres
vives de la partie arrière de la
coque doivent rester classiques;
il n'y a aucun risque de mettre
le chalut dans l'hélice.
La longueur de pont dégagé entre
la rampe et le treuil demande à
être la plus grande possible (30
à 40 m). La disposition du pont
et des treuils de manœuvre est à
prévoir en fonction du type
principal de chalut que le
navire est appelé à remorquer.
On doit pouvoir faire
varier la vitesse du navire
d'une manière continue (de 2
nœuds environ jusqu'à la vitesse
maximum). Ceci peut être obtenu
par l'un des deux modes de
propulsion diesel + hélice à pas
variable ou diesel-électrique.
Il faut prévoir des dalots
assez importants pour évacuer
rapidement l'eau embarquée sur
le pont par la rampe. Les gardes
latérales le long du chemin de
passage du chalut seront de
préférence tubulaires et non
pleines.
Par rapport à un chalutier
latéral de même taille, le
treuil de pêche sera notablement
plus puissant. Il sera bon
également de prévoir une réserve
de puissance assez grande pour
le moteur de propulsion.
b) Avantages et inconvénients du
chalutage par l'arrière.
Ils existent au même titre pour
le chalutier de moyen tonnage et
à portique oscillant pratiquant
la pêche fraîche que pour les
unités de grande pêche.
Avantages.
Il est très facile de
manœuvrer tous les chaluts, de
fond ou pélagiques, ainsi que
tous les gréements, même ceux
comportant des sphères. Le
personnel peut être très réduit
: les opérations de filage et
virage sont possibles avec six
hommes seulement.
Le filage est plus aisé sur
des accores étroits ou dans une
pêcherie concentrée, En outre,
le filage par calme plat ou dans
des conditions de courants
défavorables n'offre plus aucune
difficulté.
Le gain de temps est
appréciable, surtout dans le cas
de traits courts: il résulte
surtout d'une plus grande
rapidité de manœuvre au filage
et au virage.
Le gréement de manœuvre
(parpaillots et lapins) est
inutile: le chalut fonctionne
donc dans de meilleures
conditions.
Les changements de chaluts sont
très rapides: un quart d'heure
environ au lieu d'une demi-heure
en chalutage latéral.
Le système rend plus aisée
l'installation d'un pont-abri
pour le travail du poisson.
L'équipage sur le pont est
beaucoup moins exposé que sur un
chalutier latéral.
Il est possible d'embarquer
la pêche en une seule opération.
L'ensemble des manœuvres
requises alors pour vider la
poche est plus rapide qu'avec le
procédé des palanquées.
Inconvénients.
Le bateau peut paraitre moins
bien défendu sur l'arrière du
fait de la rampe, surtout dans
certaines conditions de mer ou
de fond, inconvénient qui doit
disparaître si les formes
arrières immergées restent
classiques comme il est
souhaitable.
En ce qui concerne les
difficultés en cas de croches,
il apparaît, à l'usage, qu'elles
ne sont pratiquement pas plus
importantes que celles d'un
chalutier latéral de fort
déplacement. Cette énumération
aura permis de montrer que, dans
le cas de la pêche industrielle,
les avantages offerts par le
chalutage par l'arrière
l'emportent largement sur les
inconvénients.
C'est
pourquoi nous pensons que cette
méthode de pêche trouvera dans
l'avenir une application de plus
en
plus large
Source :
« Le Chalut » de Claude Nedelec
et Louis Libert
Archimer
(Ifremer) |